Crystallize

 J'ai eu le choc de voir cette drôle d'émission. Tous ces enfants sur lesquels on crie. Sur lesquels on frappe. Sur lesquels ont se laisse aller. On peut tout lâcher, de toute façon, ils ne comprennent pas. Ils ne sont pas vraiment comme nous, ils sont différents. Oui, c'est vrai que parfois je me retrouve dans leurs regards, mais c'est un hasard. Oui bien sûr, leurs corps ressemblent au mien, mais bougent n'importe comment - ou pas du tout. Oui c'est vrai, ils sourient et pleurent comme moi, mais ça ne va pas dans leur tête. Alors on tape, alors on crie, alors on rejette, alors on pousse, alors on crie, alors on force, alors on maltraite. Et voilà que tout bascule, pour ces enfants qui ressentent comme n'importe qui. Et voilà que tout s'écroule pour ces vies déjà si fragiles.

Alors forcément, je me révolte. Ces images violentent ma réalité. Elles me rappellent les scènes que j'ai vu de mes propres yeux. Rien de bien méchant, de simples maladresses. Des petits débuts. Qui s'immiscent, très lentement, très subtilement. C'est alors que tout naturellement, la maltraitance apparaît. Alors oui, je me révolte. J'ai décidé de parler de ce thème dans mon mémoire. J'ai retenu le moindre geste, le moindre détail, la moindre parole insultante. J'ai dû me battre contre moi-même parfois, pour rester simple observatrice. Comment ça va finir? Mais j'étais dans une telle colère. Alors je veux écrire, je veux faire passer le message. Que non, la maltraitance n'est pas le contraire de la bientraitance. Non, la bientraitance c'est garder en tête qu'en un instant on peut déraper. 

Je suis en dernière année de formation, je dois avoir les pieds bien ancrés dans le sol. Je dois arrêter de penser que je suis Superman, que je vais tout changer. Que je suis là pour transformer tout ce qui ne va pas, d'un coup de baguette magique. Je ne suis qu'une personne, une étudiante, une jeune femme. Je n'ai plus beaucoup d'illusions, mais je ne peux pas m'empêcher de garder celle-là. Je me dis que si, je peux p'tet changer un peu. Je sais que je suis faite pour travailler auprès d'eux. Parce que chacun de leur sourire est une petite victoire, leur rire font exploser mon coeur de joie, je leur donne tout ce que je peux. Je cherche, je fouille, je veux connaître, je veux aider. Et chaque pas vers l'autonomie c'est un bonheur supplémentaire. Oui, je sais que je suis faite pour ces enfants "différents", parce que je ne me suis jamais vraiment sentie différente d'eux. Je me sens à ma place, épanouie et plus forte. Je sais que je dois garder les pieds sur Terre, que je ne suis pas Superman. Un seul Homme ne fait pas grande différence dans la vie. Pourtant ...

Je veux encore changer le monde. Ce monde.